samedi 14 octobre 2017

Nouveautés octobre : romans



Voici donc des histoires croisées, celle de Jérémie, en quête de Raphus cucullatus, alias l'oiseau de nausée, le dodo mauricien jadis exterminé par les humains, et celle de Dominique, alias Dodo, l'admirable hobo, né pour faire rire. Leur lieu commun est Alma, l'ancien domaine des Felsen sur l'île Maurice, que les temps modernes ont changée en Maya, la terre des illusions : "Dans le jardin de la Maison Blanche le soleil d'hiver passe sur mon visage, bientôt le soleil va s'éteindre, chaque soir le ciel devient jaune d'or. Je suis dans mon île, ce n'est pas l'île des méchants, les Armando, Robinet de Bosses, Escalier, ce n'est pas l'île de Missié Kestrel ou Missié Zan, Missié Hanson, Monique ou Véronique, c'est Alma, mon Alma, Alma des champs et des ruisseaux, des mares et des bois noirs, Alma dans mon coeur, Alma dans mon ventre. Tout le monde peut mourir, pikni, mais pas toi, Artémisia, pas toi. Je reste immobile dans le soleil d'or, les yeux levés vers l'intérieur de ma tête puisque je ne peux pas dormir, un jour mon âme va partir par un trou dans ma tête, pour aller au ciel où sont les étoiles".



La petite danseuse de quatorze ans de Camille Laurens

Elle est célèbre dans le monde entier mais combien connaissent son nom ? On peut admirer sa silhouette à Washington, Paris, Londres, New York, Dresde ou Copenhague, mais où est sa tombe ? On ne sait que son âge, quatorze ans, et le travail qu’elle faisait, car c’était déjà un travail, à cet âge où nos enfants vont à l’école. Dans les années 1880, elle dansait comme petit rat à l’Opéra de Paris,
et ce qui fait souvent rêver nos petites filles n’était pas un rêve pour elle, pas l’âge heureux de notre jeunesse. Elle a été renvoyée après quelques années de labeur, le directeur en a eu assez de ses absences à répétition. C’est qu’elle avait un autre métier, et même deux, parce que les quelques sous gagnés à l’Opéra ne suffisaient pas à la nourrir, elle ni sa famille. Elle était modèle, elle posait pour des peintres ou des sculpteurs. Parmi eux il y avait Edgar Degas.




La serpe de Philippe Jaenada


Un matin d'octobre 1941, dans un château sinistre au fin fond du Périgord, Henri Girard appelle au secours : dans la nuit, son père, sa tante et la bonne ont été massacrés à coups de serpe. Il est le seul survivant. Toutes les portes étaient fermées, aucune effraction n'est constatée. Dépensier, arrogant, violent, le jeune homme est l'unique héritier des victimes. Deux jours plus tôt, il a emprunté l'arme du crime aux voisins. Pourtant, au terme d'un procès retentissant (et trouble par certains aspects), il est acquitté et l'enquête abandonnée. Alors que l'opinion publique reste convaincue de sa culpabilité, Henri s'exile au Venezuela. Il rentre en France en 1950 avec le manuscrit du Salaire de la peur, écrit sous le pseudonyme de Georges Arnaud.

Jamais le mystère du triple assassinat du château d'Escoire ne sera élucidé, laissant planer autour d'Henri Girard, jusqu'à la fin de sa vie (qui fut complexe, bouillonnante, exemplaire à bien des égards), un halo noir et sulfureux. Jamais, jusqu'à ce qu'un écrivain têtu et minutieux s'en mêle...

Un fait divers aussi diabolique, un personnage aussi ambigu qu'Henri Girard ne pouvaient laisser Philippe Jaenada indifférent. Enfilant le costume de l'inspecteur amateur (complètement loufoque, mais plus sagace qu'il n'y paraît), il s'est plongé dans les archives, a reconstitué l'enquête et déniché les indices les plus ténus pour nous livrer ce récit haletant dont l'issue pourrait bien résoudre une énigme vieille de soixante-quinze ans.




Le corps des ruines de Juan gabriel Vasquez



Au cours d'une soirée chez son ami le docteur Benavides, Juan Gabriel Vásquez, auteur et narrateur du livre, fait la connaissance de Carlos Carballo, un personnage étrange, tourmenté par les meurtres d'hommes politiques célèbres. Quels liens y a-t-il entre l'assassinat, en 1948, du leader libéral Jorge Eliécer Gaitán, ceux de John Fitzgerald Kennedy et du sénateur Rafael Uribe Uribe, tué en 1914 à coups de hachette par deux menuisiers ? Pour Carlos Carballo, tout est lié par le complot de puissances obscures. En écrivain passionné par l'histoire et le récit des autres, Juan Gabriel Vásquez ne résiste pas à la tentation d'écouter ce qu'il tient pour des élucubrations et tombe dans le piège que lui tend son interlocuteur. Au cours d'une nuit hallucinée, il se rend chez Carballo pour lire le récit d'un certain Anzola sur la mort d'Uribe Uribe et le procès de ses assassins. Ces fantômes du passé qui réclament vérité et justice manquent de faire vaciller la raison de l'auteur et sèment le doute dans l'esprit du lecteur.

Autobiographie, enquête politique et policière aux accents shakespeariens, Le Corps des ruines est de la première à la dernière page un livre magistral et ensorcelant où le roman devient l'instrument par excellence de la spéculation historique. Il consacre définitivement Juan Gabriel Vásquez comme le grand écrivain latino-américain d'aujourd'hui.



Mon gamin de Pascal Voisine

Un presque enfant et un adulte pas comme les autres
Deux destins où dansent l’amitié et l’humanité.

Cet été 1977, un été de vinyles, de chaleur et de baignades, Thierry a 14 ans et découvre la musique, les premiers émois, les montagnes russes de l’adolescence où tout est à la fois morne et intense.
Il passe ses journées avec son meilleur ami, Francis, un handicapé mental qui vit à l’hôpital psychiatrique voisin depuis toujours. Le gentil Francis adorait la mère de Thierry, et va chaque semaine poser un petit caillou sur sa tombe. Il a vu naître Thierry, qu’il appelle « mon gamin », et lui voue une amitié joyeuse et entière.
Mais le destin s’appuie souvent sur pas grand-chose. Un infirmier tatoué fan d’Elvis, une belle-mère trop jeune et trop jolie, une guitare à deux manches, un chat bien curieux… Et tout bascule.

Quarante ans après ce mois d’août 1977, Thierry, devenu un chanteur à succès sous le nom de Marc Alder, va enfin découvrir la vérité sur les quelques jours qui ont changé toute sa vie. 


Point cardinal de Léonor de récondo


Sur le parking d’un supermarché, dans une petite ville de province, une femme se démaquille méticuleusement, tristement. Enlever sa perruque, sa robe de soie, rouler ses bas sur ses chevilles : ses gestes ressemblent à un arrachement. Bientôt, celle qui, à peine une heure auparavant, volait quelques instants de joie et dansait à corps perdu sera devenue méconnaissable. Laurent, en tenue de sport, a remis de l’ordre dans sa voiture et dissimulé dans le coffre la mallette contenant ses habits de fête. Il s’apprête à retrouver femme et enfants pour le dîner. Petit garçon, Laurent passait des heures enfermé dans la penderie de sa mère, détestait l’atmosphère virile et la puanteur des vestiaires après les matchs de foot. Puis il a grandi, a rencontré Solange au lycée, il y a vingt ans déjà. Leur complicité a été immédiate, ils se sont mariés, Thomas et Claire sont nés, ils se sont endettés pour acheter leur maison. Solange prenait les initiatives, Laurent les accueillait avec sérénité. Jusqu’à ce que surviennent d’insupportables douleurs, jusqu’à ce qu’il ne puisse plus réfréner ses envies incontrôlables de toucher de la soie, et que la femme en lui se manifeste impérieusement. De tout cela, il n’a rien dit à Solange. Sa vie va basculer quand, à la faveur de trois jours solitaires, il se travestit pour la première fois chez eux. À son retour, Solange trouve un cheveu blond… Léonor de Récondo va alors suivre ses personnages sur le chemin d’une transformation radicale. Car la découverte de Solange conforte Laurent dans sa certitude : il lui faut laisser exister la femme qu’il a toujours été. Et convaincre son entourage de l’accepter. La détermination de Laurent, le désarroi de Solange, les réactions contrastées des enfants – Claire a treize ans, Thomas seize –, l’incrédulité des collègues de travail : l’écrivain accompagne au plus près de leurs émotions ceux dont la vie est bouleversée. Avec des phrases limpides, des mots simples et d’une poignante justesse, elle trace le difficile chemin d’un être dont toute l’énergie est tendue vers la lumière. Par-delà le sujet singulier du changement de sexe, Léonor de Récondo écrit un grand roman sur le courage d’être soi.



Une fois dans ma vie de Gilles Legardinier


Trois femmes, trois âges, trois amies que les hasards de l'existence et les épreuves ont rapprochées dans un lieu comme aucun autre. Trois façons d'aimer. Aucune ne semble conduire au bonheur. Séparément, elles sont perdues. Ensemble, elles ont une chance. Accrochées à leurs espoirs face aux tempêtes que leur réserve le destin, avec l'énergie et l'imagination propres à celles qui veulent s'en sortir, elles vont tenter le tout pour le tout. Personne ne dit que ça ne fera pas de dégâts... Fidèle à son humanité et à son humour, grâce à son regard unique fait de sensibilité et d'un exceptionnel sens de l'observation de la nature humaine, Gilles Legardinier nous entraîne cette fois au coeur d'une troupe réjouissante, à la croisée des chemins.



Imago de Cyril Dion

Quatre personnages croisent l’histoire d’une nation violentée. Amandine, qui n’a cessé de chercher l’amour d’un homme quitte à lui cacher son désir d’enfant. Fernando, son fils aîné, fonctionnaire dans une institution d’envergure. Nadr, à qui son père n’a jamais dit sa vérité tout en lui léguant un attachement profond à la Palestine. Et Khalil, le demi-frère de Nadr, masculin abîmé d’animalité, de désespoir. D’humiliation. Alors que le djihad embrigade les jeunes de Rafah, Israël n’est plus le cœur de cible. Quand Khalil s’engage, Nadr, qui ne peut le supporter, part à sa poursuite. Et c’est à Paris que se croise- ront ces trois garçons : Fernando, Khalil et Nadr. Mais le temps ne rassemble personne.




Les Bourgeois de Alice Ferney

Ils se nomment Bourgeois et leur patronyme est aussi un mode de vie. Ils sont huit frères et deux soeurs, nés à Paris entre 1920 et 1940. Ils grandissent dans la trace de la Grande Guerre et les prémices de la seconde. Aux places favorites de la société bourgeoise - l'armée, la marine, la médecine, le barreau, les affaires -, ils sont partie prenante des événements historiques et des évolutions sociales. De la décolonisation à l'après-Mai 68, leurs existences embrassent toute une époque. La marche du monde ne décourage jamais leur déploiement. De Jules l'aîné à Marie la dernière, l'apparition et la disparition des personnages, leurs aspirations et leurs engagements rythment la formidable horlogerie de ce roman très différent d'une simple saga familiale. Car c'est ici le siècle qui se trouve reconstruit par brèves séquences discontinues, telle une vaste mosaïque où progressivement se détachent les portraits des dix membres de la fratrie - et un peu leurs aïeux, et déjà leurs enfants. Sur cette vertigineuse ronde du temps, Alice Ferney pose un regard de romancière et d'historienne. A hauteur de contemporain elle refait la traversée. Allant sans cesse du singulier au collectif, du destin individuel à l'épopée nationale, elle donne à voir l'Histoire en train de se faire, les erreurs, les silences coupables, les choix erronés qu'explique la confusion du présent. Ample et captivant, Les Bourgeois s'avère ainsi une redoutable analyse de nos racines : un livre qui passe tout un siècle français au tamis du roman familial.





Dans l'épaisseur de la chair de Jean-Marie blas de Roblès


"C'est l'histoire de ce qui se passe dans l'esprit d'un homme. Ou le roman vrai de Manuel Cortès, rêvé par son fils ? avec le perroquet Heidegger en trublion narquois de sa conscience agitée. Manuel Cortès dont la vie pourrait se résumer ainsi : fils d'immigrés espagnols tenant bistrot dans la ville de garnison de Sidi-Bel-Abbès, en Algérie, devenu chirurgien, engagé volontaire aux côtés des Alliés en 1942, accessoirement sosie de l'acteur Tyrone Power ? détail qui peut avoir son importance auprès des dames?Et puis il y a tous ces petits faits vrais de la mythologie familiale, les rituels du pêcheur solitaire, les heures terribles du départ dans l'urgence, et celles, non moins douloureuses, de l'arrivée sur l'autre rive de la Méditerranée.Dans l'épaisseur de la chair est un roman ambitieux, émouvant, admirable ? et qui nous dévoile tout un pan de l'histoire de l'Algérie. Une histoire vue par le prisme de l'amour d'un fils pour son père."



Je suis Jeanne Hébuterne de Olivia Elkaim


Jeanne Hébuterne est une jeune fille quand, en 1916, elle rencontre Amedeo Modigliani. De quinze ans son aîné, il est un artiste «  maudit  », vivant dans la misère, à Montparnasse. Elle veut s’émanciper de ses parents et de son frère, et devenir peintre elle aussi. Ils tombent fous amoureux. De Paris à Nice - où ils fuient les combats de la Première Guerre mondiale –, ils bravent les bonnes mœurs et les interdits familiaux. Mais leur amour incandescent les conduit aux confins de la folie.




L'enfant-mouche de Philippe Pollet-Villard

« Cette histoire est inspirée de l’enfance de ma mère. Une longue histoire, trouble, proche de la fable, qu’elle nous racontait autrefois et dont l’évocation la faisait presque toujours fondre en larmes. » Portrait d’une petite orpheline sous l’Occupation, L’enfant-mouche brosse un tableau sans complaisance de la vie ordinaire dans un village de province, en Champagne. C’est un quotidien de combines, de bassesses et de violences répondant au seul impératif de la survie au jour le jour. Animée par une force parfois presque surhumaine, prête à tout, Marie est une enfant adulte grandie trop vite qui détonne dans le paysage. Lorsqu’elle s’aventure du côté allemand, c’est un nouveau monde qui s’ouvre à elle. Tiré de la propre histoire familiale de Philippe Pollet-Villard et dans la veine tragi-comique qu’on lui connaît, ce roman fait ressurgir d’un passé tabou le destin inimaginable d’une enfant sauvage livrée à elle-même.











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